
Vladimir Poutine doit s’exprimer vendredi devant les troupes russes et les dirigeants d’une vingtaine de pays rassemblés sur la place Rouge à Moscou pour les 80 ans de la victoire sur l’Allemagne nazie, un événement commémoré pour la quatrième année consécutive dans l’ombre du conflit en Ukraine.
Le président russe a ordonné d’observer un cessez-le-feu du 8 au 10 mai, à l’occasion de ces célébrations qui seront couronnées par un grand défilé militaire sous les murs du Kremlin.
Mais l’Ukraine, qui fait face depuis 2022 à une offensive russe de grande ampleur, a accusé jeudi son ennemie d’attaquer sur toute la ligne de front, évoquant des centaines de violations de la trêve. L’armée russe a, de son côté, dit « respecter strictement » ce cessez-le-feu et simplement « répondre » à des violations ukrainiennes.

Les dirigeants d’une vingtaine de nations doivent se tenir aux côtés de M. Poutine, dont ses homologues chinois Xi Jinping et brésilien Luiz Inacio Lula da Silva, ainsi que ceux de pays alliés ou partenaires de la Russie comme le Kazakhstan, le Bélarus, le Vietnam, l’Arménie, Cuba et le Venezuela.
Malgré la politique d’isolement prônée par les Occidentaux, le Premier ministre slovaque Robert Fico – défiant les injonctions de l’Union européenne – et le chef de l’Etat serbe Aleksandar Vucic sont également annoncés, de même que le président des Serbes de Bosnie, Milorad Dodik, recherché par la justice bosnienne.
« Fiers«
Dans les rues de Moscou, décorées avec moult drapeaux et affiches pour l’occasion, Vladimir, 40 ans, est venu assister à la parade avec des amis et sa femme enceinte, pour « voir le matériel » militaire. « Je voulais voir cette puissance en personne. Cette fête me rend fier de mon pays », explique-t-il à l’AFP.
Tatiana Rybakova, également âgée de 40 ans, se dit aussi « fière » de son pays, mais dit espérer « la paix ». « Nous l’attendons, nous attendons que les gens soient heureux et en bonne santé. C’est la chose la plus importante », dit-elle.
Les rues de la capitale russe sont pavoisées aux couleurs nationales et l’immense majorité des commerces et des restaurants ont placardé des affiches appelant à « se souvenir » de la victoire de 1945 et à se montrer « fiers ».

Depuis mardi, l’Ukraine a multiplié les frappes de drones en Russie, visant notamment la capitale et provoquant le retard ou l’annulation de centaines de vols. La situation était toutefois calme vendredi matin à Moscou, sous un ciel bleu faiblement nuageux.
Le Kremlin avait dit prendre « toutes les mesures nécessaires » pour assurer la sécurité des célébrations, y compris en limitant l’accès à internet pour contrecarrer les drones.
Le président ukrainien Volodymyr Zelensky a vivement critiqué la parade militaire sur la place Rouge et dit considérer toute participation étrangère comme « un soutien à l’Etat agresseur » russe.
De son côté, la cheffe de la diplomatie européenne Kaja Kallas a indiqué que Kiev et ses soutiens approuveraient vendredi la création d’un tribunal spécial pour juger les « crimes d’agression » russes. Le Royaume-Uni a annoncé vendredi de nouvelles sanctions contre la « flotte fantôme » utilisée par la Russie pour exporter son pétrole et son gaz.
Hormis la vingtaine de dirigeants présents à Moscou, des soldats de 13 pays doivent prendre part au défilé, dont ceux de la Chine, du Vietnam, de la Birmanie et de l’Egypte.
Les autorités russes ont promis des cérémonies d’une ampleur inédite pour le 9-Mai, principale grand-messe patriotique en Russie et dans d’autres ex-républiques soviétiques.
Moscou et Pékin contre l’Occident
Ces trois dernières années, M. Poutine a évoqué la mémoire de la victoire sur l’Allemagne nazie pour défendre l’offensive militaire contre l’Ukraine, la Russie assurant vouloir « dénazifier » ce pays voisin dont elle occupe environ 20% du territoire.
La Seconde Guerre mondiale, qui a fait plus de 20 millions de morts en URSS et réclamé des sacrifices inouïs à la population, a causé un traumatisme qui se ressent toujours au sein de la société et qui a nourri un patriotisme exploité par le président Poutine.
Peu après le début de l’assaut contre l’Ukraine en février 2022, les autorités russes avaient interdit toute critique des forces armées, accentuant une répression qui a jeté plusieurs centaines de personnes en prison et poussé des milliers d’autres à s’exiler.

Lors d’une rencontre au Kremlin jeudi, Vladimir Poutine et Xi Jinping ont une nouvelle fois affiché leur entente face un Occident présenté comme « hégémonique ». Ils ont aussi annoncé qu’ils défendront « la « vérité historique » sur la Deuxième Guerre mondiale, alors que le dirigeant russe accuse les Occidentaux de vouloir la déformer.
La Chine est accusée d’aider la Russie à contourner les sanctions occidentales, voire de lui fournir des armes, comme l’a affirmé Kiev, ce que dément Pékin.